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Samedi 5 Décembre 2009 - 20h - La Machine à Coudre - Marseille

(Keith Richards Overdose) - Lazy Bastards - Lazybones - Menpenti - Ed Mudshi - Irritones - Sweet Children - Not' Pain Quotidien

 

Grosse soirée que ce samedi-là, pour fêter les 5 ans des activistes Massilia's Burning et les 4 ans des non-moins agités Chavana, concrétisés par le beau challenge d'une addition mathématique de 9 groupes, à passer au forceps dans une seule soirée. La Machine à Coudre est comble et cette fois-ci, ce vieux Vand pourra bien pointer tous ses potes et ceux de LiveinMarseille sur sa liste de présence : la soirée a fait carton plein, convoquant jusqu'à la crême d'Aix-en-Provence, et la salle dégueule littéralement d'un public enjoué et bruyant. Ceci malgré deux cruelles annulations, celle des sales morveux au rockabilly abrasif de Jimi Destroy & the Hot Rods (pourtant déjà vus ici et appréciés pour leur côté brouillon et furibard), et celle du énième super-groupe consanguin The Keith Richards Overdose.

Machine à Coudre by Pirlouiiiit

La maison LiveinMarseille ne reculant devant aucun sacrifice y compris pataphysique, chroniquons donc d'abord ce groupe absent, The Keith Richards Overdose. Londres a Pete Doherty et Amy Winehouse, Marseille a Huggie PinkBird Glitter Richards, Rock-star incontestable, connue pour ses mésaventures, qui le forcent régulièrement à annuler des concerts, quand ce n'est pas des tournées entières. Certes cela fait selon leur humeur bouillir ou marronner ses collègues - le batteur Guillaume ricanant en fin de soirée à l'entrée de la Machine, raconte goguenard comment la Star s'est dégonflée suite à un petit problème de digestion médicamenteuse... Bizarre, on l'avait pourtant croisé relativement fringuant, hier en fin de matinée vers 22 heures au Lollipop Music Store ?

Machine à Coudre by Pirlouiiiit

Il faut bien avouer que pour le spectateur, cela a un côté assez amusant, et donne à ses rares apparitions, toujours incisives et pétaradantes, un côté culte. Une autre fois sans doute, on est pas pressé puisque quand ce genre d'individus s'extrait du club mythique des rockeurs-morts-à-27-ans, il entre directement dans celui des légendes immortelles (Mick, Iggy, Lemmy... Keith, and co) et triple ainsi son espérance de vie. En attendant, on restera sur la description faite par Zhou (technique apprise auprès de Rock-n-Folk pour les concerts qu'on a pas vu) : ça sonne comme Huggie & the Glitters, mais en beaucoup plus rock'n'roll et plus dur. Plutôt sexy, dit comme ça, non ?

(Avant et bien vivant il y avait les Lazy Bastards dans un registre punk alternatif à la Guerilla Poubelle et compagnie. Une bonne surprise qui s'est sacrément amélioré depuis son premier concert en début d'année. D'ailleurs ils ont eu l'excellente idée de distribuer en masse et gratuitement leur premier EP à l'entrée.)

Lazy Bastards by Pirlouiiiit

Passons donc aux vivants. On arrive tandis que les Lazybones sont sur scène, groupe dont on a toujours dit le plus grand bien sur planches comme sur du polycarbonate, et qui devra donc se passer de notre présence devant la scène... Traverser le bar de la Machine serait déjà complexe sans connaître personne, le cuir des uns adhérant parfaitement à la sueur des autres pour bloquer le passage (note pour plus tard, envisager une veste dans une matière glissante quelconque, latex ou nylon, ou bien s'enduire d'huile d'olive).

Lazybones by Pirlouiiiit

Mais c'est finalement impossible d'avancer en ayant, en plus, la moitié des gens à saluer. De toutes façons en entendant leur son d'en haut, il suffit de fermer les yeux pour imaginer les trois beaux gosses, déchaînés sur leurs instruments dans leur joyeux punk-n-roll sauvage et archi-maîtrisé. Au fait, grâce à un algorithme mystérieux de Concertandco.com (de quoi faire baver Google), je suis désormais en mesure de prouver qu'à moi seul j'ai chroniqué 4 fois les Lazybones depuis 4 ans. Ce soir, donc, je passe.

Lazybones by Pirlouiiiit

Juste après, et sur la soirée à trois reprises environ, le trio Not' Pain Quotidien (1/3/ Lazybones, 1/3 Ed Mudshi, 1/3 Take Shit Back) inonde l'escalier de mélodies rythmiques et enjouées, semblant suivre une voie bien naturelle du punk-rocker vieillissant vers la java-punk (cf les Têtes Raides)... just kidding. Textes engagés et marrants pour commencer, bal-musette irlandais à la Pogues pour suivre, reprise des Lazybones (Childhood Friends) pour finir, le trio assez percutant (trop pour les cordes de ses guitares d'ailleurs) s'appuye donc sur deux guitares et un violon, et trois chanteurs qui arrivent à ne pas brailler.

Not' Pain Quotidien by Pirlouiiiit

C'est bien sûr louable vu l'ambiance et les salauds qui les couvrent exprès depuis la scène, mais on ne les entend du coup que dans un rayon de 3 mètres 50. Ayant toujours raté Ed Mudshi, je le découvre donc en tant que violoniste : il aura beau prétendre en fin de soirée que ce qu'il joue n'est pas très technique, merde, c'est quand même du violon quoi ! Les incursions de N.P.Q. s'incrustent en tout cas parfaitement entre deux déferlantes électriques, pour reposer nos pauvres oreilles comme pour remobiliser la partie de l'assistance qui a naturellement tendance à fossiliser au bar.

Not' Pain Quotidien by Pirlouiiiit

Menpenti, aperçu en atteignant finalement la salle (... mais en direction des toilettes), a sacrément progressé depuis ses débuts potaches. Teigneux et incisif, leur punk-rock parfois en français met une belle ambiance, malgré une voix du chanteur réglée un peu trop en arrière. Chronique à compléter si possible en réaction par un plus sérieux que moi (tout comme celle du premier groupe, raté) : quand je me plante enfin devant la scène, ils sont hélas déjà en train de finir...

Menpenti by Pirlouiiiit

Place à Ed Mudshi donc, qui arrive à sonner à deux comme d'autres à 4. Un rock noisy et original, très mélodique et destructuré à la fois, appuyé sur un batteur explosif et un guitariste hors pair (très technique, Ed Mudshi est probablement le meilleur de l'assemblée en la matière), qui s'amuse à glisser un clin d'oeil à Metallica et des textes en français dans une prestation de haute volée, digne des meilleurs duo rock. La voix fortement reverbée, me rappelle étrangement quelqu'un, impossible de dire qui, un français de l'époque növö... Le mélange de guitare metal et de post-punk est dissonnant et enthousiasmant à la fois, et détonne franchement parmi les autres groupes. Il déclenche d'ailleurs des hostilités pogo dans un public qui sera au fil de la soirée de plus en plus déchaîné. A revoir dans un concert complet, sans faute.

Ed Mudshi by Pirlouiiiit

Mais voici les Irritones, en configuration showcase ce soir - le look est nettement moins travaillé que lors de leur ébouriffante première prestation il y a quelques temps. Ca ne les empêche pas de saccager nos conduits auditifs d'un punk-rock saignant, composé de soli de guitare (l'influence Holy Curse), d'une frappe de mule appliquée et régulière et d'une basse hargneuse (l'influence Aggravation), de hurlements jappés en continu (l'influence Hatepinks), le tout sous influence Wire, Hives, Briefs and co. Voilà un super-groupe qui fonctionne bien, nom de dieu, ils s'écoutent et partent systématiquement au quart de tour, il y a du métier derrière !

Irritones by Pirlouiiiit

D'autant que l'Olivier Gasoil planqué derrière ses lunettes noires est remonté comme une pendule, braillant et sautillant comme à l'accoutumée, grimpant sur un baffle et se rétamant comme une crotte, frétillant comme une baby-rockeuse, ou encore venant provoquer les pogoteurs au risque de se ramasser un coup de boule perdu. Avec un concert de 22 minutes, il est manifeste qu'ils ont plusieurs nouveaux titres en plus de leur bientôt cultes Mikado Business, Rejection et Modern Life, comme par exemple Cannibal Kids, Driving Japanese Cars et un autre tout à fait jouissif qui fait We are... quelquechose. Au vu du niveau d'agitation atteint sur scène et dans le public, le format de 20 minutes semble le maximum pour Les Irritons avant de déclencher des convulsions là en haut, et de la baston là en bas... Carré et jouissif de bout en bout, le concert parfait en somme : inconstestablement le meilleur nouveau groupe punqueroque du monde.

Irritones by Pirlouiiiit

Une interruption acoustique de N'PQ plus tard, et voici ce qui sera le climax en terme d'ambiance dans le public composé en bonne partie de leurs aficionados : le retour des Sweet Children, groupe soi-disant disparu au siècle dernier que j'ai pourtant déjà raté pour les raisons habituelles aux mythiques 5 ans des Ratakans en 2005. Le répertoire des frères Mancuso est connu par coeur par leurs fans, qui montent régulièrement appuyer les choeurs au micro...

Sweet Children by Pirlouiiiit

Dans la même veine et avec des membres des Lazybones, mais le son réglé un cran plus haut, les trois doux enfants (re)jouent donc avec un plaisir non dissimulé un punk pop sautillant et costaud, appuyé par un batteur sec et affuté, au regard assez impressionnant. Ici encore, enthousiasmant, carré et sans temps morts hors problèmes techniques.

Sweet Children by Pirlouiiiit

La salle s'est d'ailleurs transformée instantanément en mosh-pit où les verres valsent et des filles trop gentilles sont bousculées sans rendre les coups, certain organisateur du concert se croyant obligé de marcher au plafond (j'ai malheureusement cafté son nom sans penser à mal à la taulière, qui mettra donc probablement une bonne fessée au sacripant), avant que plusieurs autres énergumènes fassent des tours de la colonne centrale, portés par leurs amis. Pendant ce temps sur scène, on s'échange entre frérots et avec une aisance insolente la Gretsch (splendide) contre la batterie, osant ici un titre country-pogo, là un autre punk-balloche, plus loin un truc à la Motörhead... Mich' des Lazybones, chanteur historique des années lycéennes (collégiennes ?) du groupe, vient aussi pousser la chansonnette dans cette grande fête familiale, qui se finit par une reprise tout à donf de Rancid (Maxwell Murder). Au final, encore un concert assez mortel pour ce décidément bien joyeux anniversaire !

Sweet Children by Pirlouiiiit

(Ajoutons que les Sweet Children - dernier concert le 27 mai 2005 pour les 5 ans de la Ratakans, une reformation le 26 janvier 2007 en soutien à la Machine - ont composés un morceau inédit juste pour l'occasion et ont donc pour la première fois depuis très très longtemps joués deux morceaux avec le premier line up. "The Sweet Children are back in town, just for one night we burn the floor, ...").

Sweet Children by Pirlouiiiit

La liste des invités étant épuisée après une ultime apparition du trio débranché, la salle de bal étant convenablement dévastée (on y patauge dans un liquide non identifiable parsemé de verre brisé), on finira comme à l'accoutumée en se battant avec les futs, interrompus au 10ième round pour une sombre histoire d'heure de fermeture dépassée. La Machine reste bien le meilleur endroit où être pour ce genre de soirées où déconnade, grosse ambiance, baston amicale et musique de pointe se marient parfaitement, on y reviendra donc sans se faire prier fêter l'anniversaire du lieu (15 ans déjà !) très bientôt.

Oups, au fait, j'ai failli oublier : Bon anniversaire et longue vie à Massilia's Burning et à Chavana ! Keep on rockin', you dirty brats !

Live report paru initialement sur Live in Marseille.

Philippe


Photos : Pirlouiiiit (+)


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